FUITE DE CARBURANT A NOVOSSIBIRSK

par Stang

V.O SEOUL. L’avion arrive de Séoul pour l’escale technique à Novossibirsk. Il est prévu 1H30 d’escale avec changement d’équipage. La température ambiante est de moins 26°. Le sol est glissant, les taxiways sont à peu près dégagés, la piste est bien déneigée. L’avion est « propre », à part, ce qui normal, une présence de givre au niveau des réservoirs carburants.
Les passagers en transit débarquent.
Deux mécanos russes sont sous l’aile gauche. Ils nous signalent une fuite de carburant. Le mécano est mis au courant et descend faire un état des lieux. En poste, on s’active pour la préparation du départ. Le mécano revient et nous confirme la fuite. Dans un premier lieu il va nettoyer l’intrados pour évaluer son importance. La forte température négative extérieure est incriminée. Elle aurait détérioré les joints au niveau de la pompe.
Il est 2H00 du matin, heure locale. La plus grande partie du trajet va donc se faire de nuit au-dessus de la Russie. Tous les terrains jusqu’en Allemagne sont pris sous la neige avec des plafonds et des visibilités médiocres. En bon sens paysan, quel que soit le diagnostic, nous ne sommes pas, de toute façon, très « chauds » pour nous mettre en l’air. Le mécano revient et nous annonce que la fuite est importante.
Le coordo VO (Romain), le cdb du premier équipage (Nico) et l’attaché de défense ne sont pas de trop pour gérer les conséquences d’une éventuelle immobilisation de l’avion.
M. le Ministre, les parlementaires et notre centaine de passagers attendent toujours en salle de transit et ils s’impatientent...
Sabena Technics rappelle : il faut mesurer la longueur de la fuite le long de l’intrados. La tolérance est de 18 cm. Le mécano redescend et mesure 40 cm... Nous sommes donc hors tolérance et cette constatation confirme la décision d’immobiliser l’avion.
Le galley avant est devenu une cellule de gestion de crise : plusieurs décisions sont à prendre. L’attaché de défense doit gérer le débarquement et l’hébergement de 117 passagers sans visa pour le pays. C’est le seul à parler le russe et le nombre d’intervenants extérieurs allant s’amplifiant, l’aide d’un passager est requise.
Nico expose la situation à M le Secrétaire d’Etat à la Défense (qui a déjà subi une panne sur A310 un mois auparavant...avec lui...).
Un mécano russe monte en cabine en gesticulant. Nous demandons à l’attaché de défense de nous traduire ce qu’il dit : le mécano français est tombé de l’escabeau…
Je descends avec Manu, le mécano est groggy, du sang au niveau du front.
Nous le remontons en cabine pour se faire examiner par les deux infirmiers du bord. Décision est prise de le faire évacuer sur un hôpital russe pour y subir une radio (traumatisme crânien). Il est trois heures du matin. C’est la cerise sur le gâteau...

Au bilan :
- La présence de l’attaché de défense a été cruciale : seul à parler russe, a coordonné les formalités et les opérations d’escale, le débarquement et le logement des 117 passagers et 27 membres d’équipage !! Merci Olivier.
- Très bonne gestion du CC (merci Henri) de sa cabine, en anticipant sur les actions à mener et en ayant les soucis permanents du confort de ses passagers.
- Le mécano, George, s’est fait recoudre et va très bien.
- 36H00 de retard, un deuxième A310 est arrivé le lendemain matin avec une équipe de dépannage.
- Comportement des passagers exemplaire : sourire, compréhension et patience. La plupart de ces passagers avaient plus de 70 ans (vétérans de la guerre de Corée).
Pour conclure...bravo et merci à tous !