Le SARIGuE NG

Ces modifications sont loin d’être négligeables, car il s’agit d’intégrer plusieurs dizaines de capteurs nécessitant la pose de ballonnets d’extrémités de voilures qui, eux-mêmes, demanderont le renforcement par reconstruction complète du dernier tronçon de voilure.
De même, la deuxième série de capteurs, constituant les équipements ELINT (Electronic Intelligence) destinés à l’écoute radar sera installée comme sur le premier SARIGuE dans un radome central de forme demi cylindrique d’un mètre cinquante de diamètre et de dix mètres de long.
Positionné dans l’axe du fuselage, ce radome ventral, lui aussi, nécessite un renfort de la structure du fuselage par pose d’une tôle usinée de près de 12 mètres de long.
En ce qui concerne les moyens d’interception COMINT (Communication Intelligence) pour l’écoute et l’enregistrement des communications radio, ils sont placés sur les parties supérieures du fuselage et sur la dérive.
Pour parfaire cette transformation, l’AIA aura à char e également de reconditionner la cabine de pilotage, de modifier la cabine passagers pour accueillir les seize postes des opérateurs militaires et d’en faire une plate-forme de travail longue durée. Le coût du programme s’élève à environ 1 300 millions de francs de l’époque.
Les tests d’acceptation « usine » sont réalisés par le Centre électronique de l’Armement de Rennes, centre d’essais de la DGA et spécialiste du domaine de la guerre électronique. Après quelques mois d’essais d’ouverture du domaine de vol, qui sont effectués par le CEV d’Istres, sous le matricule d’essais F-ZVMT, l’appareil est transféré dans les hangars d’Air France Industries au Bourget pour y effectuer l’intégration des systèmes.
À l’issue de cette étape, il subit les essais en vol des systèmes, conduits et menés par les personnels des bases d’essais de Brétigny et de Cazaux, mais aussi avec l’équipe de marque « SARIGuE NG » du Centre d’expérimentations aériennes militaires de Mont-de-Marsan.
Prévu pour être remis à l’armée de l’Air en 1999, finalement le DC-8-721 (nouvelle désignation militaire) «SARIGuE NG» F-RAFD est remis officiellement à son utilisateur courant 2000. Le 12 avril 2001, il fait l’objet, en compagnie de son aîné, d’une présentation officielle à la presse sur la base d’Évreux, base de l’EE 51 Aubrac. Ce sera la seule occasion de voir immortaliser les deux «SARIGuE» côte à côte, le F-RAFE, premier du nom, étant retiré du service actif quelques mois plus tard avant de prendre une retraite bien méritée dans les collections du Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget.
À partir du 25 juillet 2001, le DC-8-721 F-RAFD assure seul le rôle de plate-forme de guerre électronique à long rayon d’action, mais ce dernier n’aura pas la même durée d’exploitation que son aîné.
L’équipage de ce deuxième « SARIGuE » est constitué de deux pilotes, d’un ingénieur-mécanicien et
de vingt-quatre opérateurs occupant les postes d’écoute-radio, d’écouteradar, de console de surveillance technique, etc.

Rare cliché du DC-8-721 « SARIGuE NG », c/n 46043, portant son matricule d'essai F-ZVMT (devant la porte arrière). On note les nombreuses antennes hérissées sur l'avant du fuselage et les carénages d'extrémité d'ailes, mais la décoration n'a pas changé. Photographie prise au Bourget en 1996. (Collection R. Biaux)

Sous l’impulsion de Pierre Joxe, ministre de la Défense de l’époque et tenant compte de la nécessité de renforcer le dispositif de renseignement, le programme SARIGuE « NG » (Nouvelle Génération) est lancé en 1993.
En effet, le premier DC-8 SARIGuE, en service au sein de l’EE 51 Aubrac depuis 1977, aura besoin d’un remplaçant à l’aube des années 2000.
Le choix du porteur se fixera une nouvelle fois sur une cellule de DC-8-72 CF remotorisé avec des CFM56, appareil qui sera prélevé sur la dotation de la flotte de l’ET 03/60 Estérel du COTAM, et ce, à partir de 1995.
C’est à la Division RCM (Radar et Contre-mesures) de Thomson-CSF (devenu Thales) que revient la maîtrise d’œuvre globale du SARIGuE NG, Air France Industries(UTA Industries faisant désormais partie du Groupe Air France) se voyant confier la sous-traitance de la grande visite de l’appareil, tout comme les études générales des modifications de structures.
Quant aux travaux de transformation, c’est dans les hangars de l’Atelier Industriel de l’Aéronautique (AIA) de Clermont-Ferrand qu’ils seront réalisés à partir de 1995.
C'est un très gros chantier de près d’un million d’heures de travail au total, dont une très grande partie consacrée à des opérations de maintenance, 200 000 heures étant planifiées pour la rénovation, la modification de l’avion et la transformation qui permettront d’embarquer les douze tonnes d’équipements et d’électronique développées par Thomson-CSF et nécessaires à l’accomplissement de la future mission d’écoute radar, d’interception et de localisation des émetteurs.